Discrimination : même à formation égale, la position sur le marché du travail reste déterminée par l’origine.

Le troisième Monitoring socio-économique démontre que l’origine reste un facteur déterminant pour expliquer les inégalités sur le marché du travail. L’écart entre les personnes d’origine belge et les personnes d’origine étrangère est manifeste. Si un niveau d’éducation élevé favorise la participation au marché du travail pour tout le monde, le rapport démontre que pour un même niveau de qualification élevé, il persiste des inégalités notables en fonction de l’origine. De quoi mobiliser tous les acteurs concernés, à commencer par les partenaires sociaux.

Le rapport ‘Monitoring socio-économique – Marché du travail et Origine’ est le fruit de deux années de collaboration entre le SPF Emploi, Travail et Concertation sociale et Unia, avec le soutien de la Banque Carrefour de la Sécurité sociale et du Registre national. La combinaison de données administratives fournit un ensemble unique de données relatives au marché du travail. Le rapport recense toute la population de 18 à 64 ans en combinant des données sur l’origine et l’historique migratoire (durée de séjour, acquisition de la nationalité…) avec des informations sur la position sur le marché du travail pour la période 2008-2014.

Un retard persistant
Le Monitoring socio-économique 2017 confirme une nouvelle fois que le retard des personnes d’origine étrangère sur le marché du travail n’est pas aussi important dans les autres pays de l’UE qu’en Belgique. Le taux d’emploi s’élevait en 2014 à 73% pour les personnes d’origine belge contre 42,5% pour les personnes originaires d’Afrique sub-saharienne, 42,2% pour celles originaires d’un pays européen hors UE, 44,3% pour celles originaires du Maghreb et 46,0% pour celles originaires de pays candidats à l’UE (principalement la Turquie).

L’enseignement ne suffit pas
Le rapport met aussi en lumière un certain nombre d’éléments nouveaux. Ainsi, pour la première fois, le niveau de qualification a pu être appréhendé pour la plus grande partie de la population.
Si le principal problème du marché du travail en Belgique reste l’intégration très difficile des travailleurs peu qualifiés, le rapport démontre qu’un niveau élevé de qualification ne gomme pas les inégalités entre travailleurs d’origine belge et travailleurs d’origine étrangère.
Par exemple, les travailleurs qui ont un niveau de qualification élevé mais une origine non européenne ont un taux d’emploi inférieur de 10 points de pourcentage par rapport aux travailleurs d’origine européenne (non compris les personnes d’origine belge).
On trouve également toujours beaucoup plus de personnes peu qualifiées d’origine belge que d’autres origines dans les catégories salariales les plus élevées (12,3% contre p. ex. 4,2% pour les personnes peu qualifiées d’origine maghrébine) et les ressortissants très qualifiés de l’UE arrivés récemment ont, en moyenne, à peine la même probabilité d’avoir un emploi que les travailleurs peu qualifiés d’origine belge.
Cela révèle une incapacité à exploiter de manière optimale les compétences de chacun dans notre économie. « Même à qualification égale, les personnes d’origine belge s’en sortent généralement beaucoup mieux sur le marché du travail que les autres, » constate Jan Vanthuyne, président a.i. du SPF Emploi. « L’intégration des travailleurs peu qualifiés de toutes les origines reste l’un des plus grands défis pour notre politique de l’emploi. »

Le double handicap des femmes d’origine étrangère
Le Monitoring 2017 démontre par ailleurs le rôle important de la composition familiale et du genre. L’écart entre les hommes et les femmes s’est certes réduit entre 2008 et 2014, tant sur le plan de l’emploi que sur celui de la rémunération. Mais il reste substantiel et il varie en outre fortement selon l’origine. C’est pour les femmes avec enfants que ce constat est le plus frappant. A titre d’illustration : pour les personnes d’origine maghrébine, les femmes isolées ont un taux d’emploi plus élevé que les hommes isolés, mais celui des femmes vivant en couple avec enfant(s) n’est que de 30,6% contre 66,2% pour les hommes dans la même situation familiale.
Les femmes d’origine étrangère, même avec un niveau de qualification élevé, se retrouvent de manière disproportionnée dans les catégories de bas salaires et sont surreprésentées dans les chiffres du chômage.
“De manière générale, les écarts de genre sur notre marché du travail sont plus réduits que dans d’autres pays de l’UE,” constate Patrick Charlier, directeur d’Unia, “mais ce n’est certainement pas vrai pour toutes les origines. La sous-représentation des femmes d’origine étrangère dans l’emploi reste préoccupante. ».
Par ailleurs, le rapport s’est intéressé pour la première fois aux motifs de séjour liés aux personnes qui ont émigré en Belgique. Sans surprise, les personnes qui sont venues ici avec comme motif de séjour ‘le travail’ sont celles qui travaillent le plus, mais les demandeurs d’asile reconnus s’intègrent assez bien sur le marché du travail, après les inévitables difficultés initiales. « Ici aussi, il s’agit de prêter attention aux femmes d’origine étrangère. Les personnes qui arrivent sur le territoire pour un motif de regroupement familial, dont la majorité sont des femmes, ont un accès plus difficile au marché du travail, même si après un certain temps en Belgique, leur taux d’emploi augmente », précise Patrick Charlier.

Le secteur public
Le Monitoring s’est également penché sur le secteur public, dont il s‘avère qu’il ne remplit pas encore sa fonction potentielle d’exemple. Malgré des différences entre régions et quelques évolutions positives, le secteur public reste souvent fortement occupé par les personnes d’origine belge. “Elles restent nettement surreprésentées, en particulier parmi les fonctionnaires statutaires,” selon Jan Vanthuyne, “et un mouvement de rattrapage est nécessaire.”

Inégalité des chances et segmentation du marché du travail
Les causes de ce retard persistant sont complexes. “La discrimination sur le marché du travail est bien sûr un facteur important,” constatent Jan Vanthuyne et Patrick Charlier, “mais les obstacles élevés à l’entrée, la faible mobilité professionnelle, l’inégalité des chances dans l’enseignement et les difficultés rencontrées par les familles dans lesquelles personne ne travaille jouent aussi un rôle ».
De plus, le rapport souligne que pas mal de personnes d’origine étrangère travaillent dans le segment plus dynamique mais aussi souvent plus incertain du marché du travail, avec des emplois à durée déterminée, des salaires plus faibles, plus d’incertitudes et de moins bons statuts sociaux pour ceux qui ne travaillent pas. Le travail à temps partiel a ainsi augmenté et bon nombre de personnes d’origine étrangère se sont lancées dans une activité indépendante. Leur surreprésentation dans le secteur des titres-service, de l’intérim, de la construction, du nettoyage et de l’horeca est aussi frappante.

Nécessité d’une approche intégrée
Puisqu’un des facteurs expliquant ces inégalités relève de pratiques discriminatoires, Unia préconise de renforcer les moyens de contrôle de l’application effective de la législation anti-discrimination. Les avancées à Bruxelles et, à venir, au niveau fédéral sont d’ailleurs saluées : « Les tests de situation peuvent contribuer de manière significative à l’objectivation de comportements discriminatoires », selon Patrick Charlier. « Une surveillance accrue des autorités stimulera automatiquement l’autorégulation dans les entreprises et les secteurs. » conclut Patrick Charlier.
Enfin le rapport révèle un phénomène à plusieurs dimensions, Unia et le SPF Emploi plaident pour une approche intégrée. « L’impulsion devrait être donnée par une conférence interministérielle où non seulement les ministres chargés de l’emploi, mais également les ministres de l’éducation et de l’égalité des chances, pourront discuter de ce retard sur le marché du travail », avancent Patrick Charlier et Jan Vanthuyne. « En outre, l’intégration des personnes d’origine étrangère doit également figurer en tête de l’agenda de la concertation sociale », concluent-ils.

Source : SPF Emploi – Le rapport complet ainsi que la présentation sont disponibles sur le site web du SPF Emploi.

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