Enfin une évaluation précise du nombre d’emplois menacés par l’automatisation dans la zone OCDE!

Il était temps ! Face à la numérisation accélérée de notre économie, il n’y a jusqu’à présent que peu d’études approfondies quant au nombre d’emplois effectivement ‘menacés’ par la robotisation des activités. L’OCDE, par l’intermédiaire de sa direction Emploi & Affaires sociales, a publié en ce mois de mars 2018 un document de synthèse intitulé ‘’Automation, Skills Use and Training’’. Celui-ci évalue de façon précise les fonctions concernées par la révolution digitale et, surtout, identifie les enjeux en matière de formation et de gestion des inégalités, entre autres. Extraits.

Les conséquences sur l’emploi et les compétences des progrès de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage automatique ont été au cœur des récents débats sur l’avenir de l’emploi et les transformations induites par les technologies numériques.
L’étude détermine un risque d’automation qui est spécifique à chaque emploi en utilisant l’Enquête sur les Compétences des Adultes (PIAAC). Le risque d’automatisation est estimé jusqu’à présent pour les 32 pays de l’OCDE ayant participé à l’Évaluation des compétences des adultes. Outre la proportion d’emplois à risque d’être perturbés par l’automatisation de la production et des services, l’étude s’intéresse en particulier aux caractéristiques desdits emplois et des travailleurs qui les occupent. Quels sont donc les principaux résultats ?

Une enquête menée en 2013 par Frey et Osborne évaluait que 47 % des emplois aux Etats-Unis seraient exposés à un risque élevé d’automatisation. Plusieurs autres chercheurs et institutions ont apporté leur contribution au débat et tous sont parvenus à des estimations très élevées. Des études conduites plus récemment à partir de données de l’Évaluation des compétences des adultes du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC) ont abouti à des estimations nettement inférieures du pourcentage d’emplois menacés d’automatisation.
Ces études montrent que les tâches à exécuter varient considérablement entre des emplois appartenant à une même profession et qu’il est indispensable d’en tenir compte pour apprécier l’ampleur du phénomène d’automatisation. Notamment, en tenant compte de cette variabilité, Arntz, Zierhan et Gregory (2016) évaluent à 9 % la proportion d’emplois menacés aux États-Unis. Quoique nettement inférieur à l’estimation de Frey et Osborne, ce pourcentage représente environ 13 millions d’emplois sur l’ensemble du territoire des États-Unis d’après les statistiques sur l’emploi de 2016.

Les travaux réalisés par ces 3 chercheurs pour l’OCDE porte sur une zone géographique plus large, à savoir sur les 32 pays qui participent à ce jour à l’Évaluation des compétences des adultes. Sont notamment inclus dans l’analyse les travailleurs qui sont dépourvus de compétences élémentaires en informatique et/ou qui occupent des emplois ne nécessitant pas l’utilisation d’un ordinateur. Comme il existe une corrélation négative entre l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) et le risque d’automatisation, l’estimation de la proportion d’emplois menacés d’automatisation obtenue dans cette étude est plus élevée.

50% des emplois affectés, 14% des emplois menacés.

Dans les 32 pays étudiés, près d’un emploi sur deux risque d’être sensiblement affecté par l’automatisation compte tenu des tâches qu’il comporte. Toutefois, l’ampleur du risque est variable. Dans les pays de l’OCDE qui participent à l’Évaluation des compétences des adultes, environ 14% des emplois sont fortement automatisables (caractérisés par une probabilité d’automatisation supérieure à 70 %). Ce pourcentage représente 66 millions de travailleurs au total dans les 32 pays étudiés.
Par ailleurs, 32 % des emplois sont exposés à un risque d’automatisation compris entre 50 et 70 %, ce qui signifie que la manière dont ils sont exercés pourrait se transformer sensiblement sous l’effet de l’automatisation – en d’autres termes, bien que toutes les tâches qu’ils comportent ne soient pas concernées, une forte proportion pourrait être automatisée, si bien qu’ils exigeront des compétences différentes.

A noter que le risque d’automatisation est très variable d’un pays à l’autre : alors que 33% des emplois sont fortement automatisables en Slovaquie, ce pourcentage ne dépasse pas 6% en Norvège. Plus généralement, les emplois se prêtent moins à une automatisation dans les pays anglo-saxons, dans les pays nordiques et aux Pays-Bas que dans les pays d’Europe de l’Est et d’Europe du Sud, ainsi qu’en Allemagne, au Chili et au Japon.
Les écarts entre pays en matière de risque d’automatisation s’expliquent davantage par des différences au niveau de l’organisation des tâches au sein des secteurs économiques que par des différences de structure sectorielle. Ainsi, 30% environ de ces écarts sont imputables à des différences de structure sectorielle, tandis que les 70 % restants sont dus au fait que l’éventail des professions représentées au sein de ces secteurs varie selon les pays.

L’analyse détaillée des données démontre que les tâches difficilement automatisables comme celles qui font appel à des compétences analytiques et sociales sont devenues plus courantes au sein d’une même profession, mais le nombre de professions dans lesquelles elles étaient déjà fréquentes a lui aussi augmenté.

Le grand danger de l’inégalité.

Le risque d’automatisation n’est pas réparti de manière égale entre les travailleurs. L’automatisation touche principalement des emplois des secteurs manufacturier et agricole, même si certaines activités de service, comme les activités de poste et de courrier, de transport terrestre et les services de restauration sont également très facilement automatisables. En règle générale, les professions les plus exposées au risque d’automatisation exigent un niveau d’études très faible à faible. À l’inverse, la quasi-totalité des professions qui se prêtent le moins à une automatisation requièrent une formation professionnelle et/ou un diplôme de l’enseignement supérieur.

Dans l’ensemble, la thèse régulièrement avancée selon laquelle l’automatisation pourrait commencer à avoir des conséquences négatives sur certaines professions très qualifiées n’est pas corroborée par le cadre d’évaluation des goulets d’étranglement défini par Frey et Osborne (2013) et utilisé dans cette étude. En fait, l’intelligence artificielle menace sans doute davantage les emplois non qualifiés que les précédentes vagues de progrès technologique, qui s’étaient essentiellement traduites par une substitution de la technologie aux emplois moyennement qualifiés et avaient entraîné une polarisation du marché du travail.

Péril jeune.

Enfin, une conclusion inédite et surprenante se dégage de l’étude, à savoir que le risque d’automatisation le plus élevé concerne les emplois occupés par les adolescents. Le lien entre automatisation et âge prend en effet la forme d’une courbe en U, mais le sommet atteint par la probabilité d’automatisation est beaucoup plus élevé pour les emplois occupés par les jeunes que pour ceux occupés par les travailleurs âgés. L’automatisation risque donc nettement plus de se traduire par du chômage parmi les jeunes que par des départs en préretraite.
Cette inégale répartition du risque d’automatisation ne fait qu’accroître l’enjeu des politiques visant à préparer les travailleurs à satisfaire aux nouvelles exigences du marché du travail. Dans ce contexte, la formation des adultes est un instrument primordial pour permettre à ceux dont les emplois sont touchés par le progrès technologique de se reconvertir ou d’améliorer leurs qualifications. Malheureusement, l’étude laisse penser qu’il reste un long chemin à parcourir pour faciliter l’accès à la formation des catégories les plus concernées par l’automatisation. La probabilité de participer à une formation, en cours d’emploi ou non, est en effet nettement plus faible parmi les travailleurs dont les emplois sont menacés d’automatisation.
Ces conclusions montrent à quel point il est important d’offrir des formations en dehors du cadre professionnel, en particulier aux travailleurs qui occupent un emploi comportant essentiellement des tâches automatisables.

Dans l’ensemble, le fait que les chiffres relatifs à la destruction d’emplois obtenus dans cette étude à partir de données relatives aux tâches spécifiques à chaque emploi soient inférieurs à ceux calculés sur la base des professions ne doit pas faire oublier combien il est essentiel que les 14% de travailleurs dont l’emploi risque de se transformer radicalement ou de disparaître aient accès à une protection sociale et à une formation pour se reconvertir. Ces travailleurs bénéficient très rarement d’une formation proposée par leur employeur. En outre, divers facteurs peuvent les empêcher de participer à la formation des adultes, notamment le manque de connaissances de base, de temps et de motivation.

L’OCDE insiste encore sur l’hypothèse d’une concentration régionale du risque d’automatisation amplifiant ses retombées sociales et économiques, en particulier dans les pays où la mobilité géographique est limitée. L’OCDE a engagé des travaux pour effectuer des estimations régionales du risque d’automatisation afin de mettre en évidence les implications de la concentration de ce risque pour l’action publique.

Source : OCDE – working paper on jobs most at risk of automation

This website is brought to you by Quasargaming.com's online Fruitautomaten games such as Speelautomaten and Gokautomaten.