Notre réglementation évolue au ralenti depuis 5 ans.

La Fédération des Entreprises de Belgique a commandité une étude visant à évaluer l’amélioration comparée de la réglementation au cours des 10 dernières années. Deux enseignements principaux. Primo, globalement, nous constatons une amélioration des réglementations impactant le fonctionnement de nos entreprises. Secundo, cette évolution positive est freinée depuis 5 ans. In extenso, voici l’executive summary de cette étude menée par le bureau IDEA Consult.

1. Une meilleure réglementation favorise la compétitivité d’un pays
La crise, d’abord financière puis économique, a éveillé davantage les consciences quant à l’importance du rôle que joue la confiance dans l’économie et dans les autorités pour le bon fonctionnement de l’économie. C’est également le cas pour le rôle qu’une meilleure réglementation, ou « better regulation », peut jouer pour garantir que les règles sont adaptées et efficaces et qu’elles sont respectées et appliquées. À la lumière des conséquences de la crise, une meilleure réglementation constitue l’une des stratégies pour stimuler l’économie et ce, en particulier pour des pays, parmi lesquels la Belgique, qui disposent d’une marge de manœuvre réduite pour encourager leur économie au moyen de mesures fiscales ou monétaires. L’attention croissante portée à la qualité de la réglementation, en particulier celle applicable aux entreprises, en tant que levier pour la croissance économique est également le résultat d’études empiriques démontrant une relation positive entre de meilleures réglementations et les performances économiques d’un pays ou d’un secteur.

2. Les 37 indicateurs permettant de juger de la qualité de la réglementation en Belgique
Pour mesurer la qualité de la réglementation, les analystes ont élaboré un cadre méthodologique qui rassemble de manière argumentée et structurée pas moins de 37 indicateurs permettant chacun d’évaluer certains aspects de la qualité d’une réglementation. Sur la base de ces indicateurs, un outil de monitoring a été développé pour mesurer les progrès des autorités belges dans leur quête d’une réglementation de meilleure qualité. Il s’agit donc pour ainsi dire d’une mesure de référence à laquelle pourront être comparées les versions suivantes de cet outil pour évaluer si des progrès réels ont été accomplis dans les prochaines années.
Dans le baromètre, la Belgique est comparée, d’une part, avec 7 pays de référence sur le plan international (Pays-Bas, Allemagne, France, Royaume-Uni, Danemark, Suisse et Canada), car ces pays ne cessent d’améliorer la qualité de leur réglementation. Les progrès enregistrés par la Belgique et qui favorisent la compétitivité des entreprises ne sont, en effet, de véritables progrès que dans la mesure où notre position relative par rapport aux pays de référence s’améliore. Pour ces indicateurs de référence, nous comparons 3 observations instantanées (10 ans auparavant, 5 ans auparavant et l’année la plus récente, qui varie de 2013 à 2015).
D’autre part, des indicateurs belges qui donnent aussi une idée de la qualité de la réglementation sont également présentés. Il est alors, par exemple, question de l’évolution du nombre de pages dans le Moniteur belge, des différents types de réglementation (au niveau fédéral et régional), des charges administratives, etc. Ceci est complété par des indicateurs intéressants rassemblés par le biais d’une enquête réalisée par la FEB dans le cadre de ce baromètre. Elle s’adressait aux entreprises, toutes tailles et tous secteurs confondus, afin de déterminer quelle est leur expérience de la qualité de la réglementation.

3. La Belgique reste à la traîne au niveau européen !
Il ressort du classement international que la Belgique est très souvent en queue de peloton pour les différents indicateurs. Elle est immanquablement accompagnée de la France, dont les performances sont souvent moins bonnes. Contrairement à la France, la Belgique est cependant parvenue à améliorer ses résultats pour quasiment tous les indicateurs par rapport aux résultats obtenus 10 ans auparavant. Les efforts fournis ces 10 dernières années portent donc leurs fruits, mais nous devons toutefois signaler que ces résultats ont principalement été obtenus les 5 premières années, car les performances belges pour de nombreux indicateurs ont à peine évolué au cours des 5 dernières années (p. ex. les charges imposées par la réglementation, le nombre de procédures pour le lancement d’une activité ou l’obtention de contrats, la discussion et la révision de la réglementation, la transposition de la réglementation au moment adéquat) ou ont même accusé un recul (p. ex. les procédures supplémentaires qui sont imposées pour l’enregistrement de propriété – l’attestation du sol est obligatoire à Bruxelles depuis 2011). Les pays qui présentaient il y a 10 ans des scores élevés pour les indicateurs (Suisse, Canada et Pays-Bas) ont également réussi à progresser dans de nombreux domaines ces 10 dernières années. La progression semble cependant plus faible qu’en Belgique. Notre handicap relatif sur le plan de la compétitivité s’en voit quelque peu réduit, mais il reste néanmoins un très grand fossé entre la Belgique et ces pays très performants. L’Allemagne, qui se trouvait plutôt en fin de peloton il y a 10 ans, a connu la plus grande progression ces 10 dernières années et est parvenue à creuser son avantage compétitif sur la Belgique grâce à la qualité de sa réglementation. Le Danemark doit, quant à lui, renoncer à la première position qu’il occupait il y a 10 ans dans différents domaines, mais continue à obtenir de bons résultats.

4. Les charges administratives en Belgique augmentent à nouveau après 2008.
Malgré la progression de la Belgique constatée dans les sources internationales, les entreprises interrogées par la FEB ont indiqué qu’elles n’ont ressenti qu’un léger impact positif à la suite des initiatives concrètes de simplification au niveau fédéral (p. ex. les chèques-repas, la signature et la facturation électroniques) et parfois même quasiment aucun effet (p. ex. la simplification des statistiques et des enquêtes, la simplification et l’informatisation de la législation du travail). Les domaines de réglementation qui ont le plus grand impact sur le fonctionnement des entreprises sont les législations relatives au marché du travail, à la sécurité sociale et la législation fiscale. L’influence de la réglementation dans ces domaines est également celle qui a le plus augmenté durant les 2 dernières années. La réglementation relative à l’environnement enregistre un score moyen en termes d’impact mais elle a connu une forte croissance ces 2 dernières années. Cela confirme dans les grandes lignes les tendances qui s’étaient dégagées dans l’enquête bisannuelle la plus récente du Bureau du Plan concernant les charges administratives de 2012. Cette enquête a mis en lumière qu’après 2008, les charges administratives étaient à nouveau à la hausse, mettant en péril la baisse des charges administratives enregistrée pendant le lancement du plan Kafka. Ce sont surtout les PME qui en ont subi les conséquences étant donné qu’elles ne disposent souvent pas de juristes ou de fonctions de cadre spécialisées pour transposer la réglementation au contexte de leur entreprise. Elles doivent dès lors se tourner vers un accompagnement externe, par exemple auprès des secrétariats sociaux, des comptables et des fiscalistes.

5. L’explosion du nombre de textes réglementaires au Moniteur belge
Il n’est pas surprenant que les entreprises éprouvent de plus en plus de difficultés à se tenir au courant de la réglementation car le nombre de pages du Moniteur belge augmente sans cesse, avec un chiffre record de 107 000 en 2014, à savoir 34 % de plus qu’en 2011 (année durant laquelle l’impasse politique a provoqué une certaine inactivité réglementaire). Si cette hausse ne doit pas nécessairement être attribuée à une plus grande réglementation, il faut toutefois préciser que la réforme de l’État y a évidemment contribué étant donné que des réglementations jusqu’alors gérées au niveau fédéral sont à présent appliquées par les trois Régions. Pour les entreprises actives dans les 3 Régions, cela engendre une charge réglementaire accrue. Si nous dégageons du Moniteur belge uniquement les textes de nature réglementaire au moyen de la base de données du Conseil d’État, Reflex, nous constatons également une augmentation du nombre de réglementations fédérales et régionales depuis 2011. Le nombre de textes passe de 1 823 en 2011 à 2 763 en 2014, soit une hausse considérable de 52 %. La réglementation fédérale connaît l’augmentation la plus marquée, ce qui est quelque peu surprenant étant donné la sixième réforme de l’État.

6. Plus de la moitié des chefs d’entreprise ne sont pas satisfaits de la réglementation actuelle
Près d’une entreprise sur deux interrogées estime que la réglementation actuelle ne répond pas à ses besoins. Seulement 20 à 40 % des entreprises, selon le domaine de réglementation, trouvent que la réglementation est simple à comprendre. C’est notamment au domaine de la fiscalité que les entreprises attribuent un score toujours plus bas. En outre, 6 entreprises sur 10 interrogées par le Bureau du Plan considèrent qu’il manque une définition claire des objectifs. Les réglementations relatives au travail, à la sécurité sociale et à la fiscalité constituent le top 3 des réglementations comportant les charges réglementaires les plus lourdes pour les entreprises.
Les chefs d’entreprise signalent également que les simplifications résultent souvent de l’informatisation de procédures existantes (la manière de procéder), mais que les réformes structurelles et drastiques du contenu des réglementations n’arrivent pas. L’on se demande trop rarement si la réglementation est encore nécessaire, si elle atteint son but, si les coûts sont proportionnels aux bénéfices, s’il n’existe pas des options autres que la réglementation, etc. En conséquence, certaines décisions politiques, même si elles sont destinées à favoriser la compétitivité de nos entreprises, rendent la réglementation encore plus complexe en y ajoutant toutes sortes d’exceptions. Ces adaptations de la réglementation engendrent non seulement une charge administrative mais aussi des coûts de mise en conformité tels que des coûts de services externes, d’équipement, d’adaptation des systèmes, produits ou services internes, des frais généraux, davantage de temps non productif, etc. C’est pour les PME que les coûts réglementaires sont les plus lourds, car elles ne sont plus en mesure de gérer la réglementation et doivent dès lors de plus en plus faire appel à des spécialistes. Cela engendre naturellement des coûts supplémentaires pour les entreprises en plus de la charge réglementaire déjà lourde, hypothéquant davantage la compétitivité des entreprises.

7. La nécessité d’une politique de réglementation durable, intégrée et bénéficiant du soutien politique
La position de force des pays de référence sur le plan international ne tient pas du hasard. Ce qui caractérise tous ces pays, au niveau de l’ensemble des indicateurs, c’est une politique de réglementation intégrée au départ d’une vision claire et avec un engagement politique explicite à l’égard d’une meilleure réglementation. Cette politique de réglementation intégrée y est souvent appliquée depuis de nombreuses années, parfois même des décennies. La progression précédemment citée réalisée par la Belgique a surtout eu lieu au début de la période étudiée, lorsque la simplification administrative était un thème politique plus fort, entre autres avec le plan Kafka. Ces 5 dernières années ont manqué d’un plan ambitieux concernant les charges administratives. Au niveau fédéral, la Belgique a introduit l’AIR (analyse d’impact de la réglementation) à l’instar des pays de référence où cet outil a été mis en place beaucoup plus tôt. Jusqu’à présent, l’AIR au niveau fédéral n’a pas encore rencontré le succès escompté, et il fallait un peu s’y attendre. Ce qui caractérise les pays de référence qui se trouvent en bonne position et la raison pour laquelle ces instruments y sont souvent plus efficaces c’est que ces instruments sont intégrés au sein d’un ensemble plus vaste (la politique de réglementation) et qu’ils encouragent les utilisateurs des instruments à l’aide de mandats clairs pour que l’utilisation de l’instrument soit efficace et de qualité. Pour ce faire, il est courant que des unités soient désignées au sein des administrations pour effectuer un suivi plus approfondi de la procédure et exécuter les contrôles de qualité exigés. L’intégration étroite dans le système permet à ces pays de référence d’obtenir de bons résultats dans quasiment tous les domaines, justement grâce à la politique intégrée qui veille à ce que tous les plans soient abordés et probablement à ce qu’ils se renforcent mutuellement.

5 recommandations pour une meilleure réglementation en Belgique et des entreprises plus compétitives
Pour remédier à la situation et réduire de manière substantielle les coûts réglementaires, il est donc nécessaire de mettre sur pied une nouvelle opération Kafka, et ce à tous les niveaux de pouvoir. Pour ce faire, il ne faudra pas se contenter d’une informatisation des procédures. Cette opération doit reposer sur les 5 lignes directrices suivantes :
• Opter pour une vision à long terme et des réformes systémiques
• Mettre davantage à profit les instruments existants
• Apprendre de l’expérience des pays de référence
• Viser davantage que simplement l’informatisation des procédures existantes
• Effectuer le suivi des progrès accomplis et les communiquer

Source : Fédération des Entreprises de Belgique.

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