Réforme des retraites : le rachat des périodes d’études bientôt accessible à tous.

Selon la législation actuelle, le rachat des périodes d’études dans le cadre de la pension de retraite est possible dans les régimes salarié et indépendant, mais avec des modalités différentes. En revanche, les fonctionnaires bénéficient de la gratuité des bonifications pour diplôme pour le calcul de leur pension. Le gouvernement cherche à harmoniser les règles de régularisation des trois régimes de pension. À la demande du gouvernement, le Bureau fédéral du Plan a réalisé une estimation de l’impact de cette réforme sur le coût budgétaire du vieillissement ainsi qu’une estimation des recettes issues de cette harmonisation.

Quelle est la teneur de la réforme en cours? Un travailleur salarié, un travailleur indépendant ou un fonctionnaire pourra régulariser ses périodes d’études à condition de payer une cotisation. Les périodes d’études concernées sont celles qui précèdent l’obtention d’un diplôme de l’enseignement supérieur, celles au cours de laquelle on prépare une thèse de doctorat et la période de stage professionnel.
Une personne peut adresser maximum 2 demandes de régularisation pour tous les régimes de pension. La régularisation est prise en compte dans le régime dans lequel se trouve la personne au moment de la demande.

Dans le secteur public, les droits constitués pour les bonifications gratuites pour diplôme dans le calcul de la pension sont maintenus au prorata de la carrière déjà prestée au 1er juin 2017. En outre, les fonctionnaires conservent leurs bonifications gratuites pour diplôme s’ils satisfont aux conditions pour bénéficier d’une mise à la retraite anticipée au plus tard le 1er juin 2018. Cette gratuité est également accordée aux personnes qui, au plus tard le 1er juin 2017, se trouvent dans un régime de disponibilité préalable à la retraite (ou remplissent les conditions pour y accéder).

Comment calculer la régularisation?
La cotisation de régularisation dépend du moment où la demande de régularisation est introduite. Pendant une période transitoire allant du 1er juin 2017 au 31 mai 2020, il est possible de régulariser ses années d’études contre un montant forfaitaire de 1 500 euros par année d’études (à l’indice actuel de 138,81). Ce montant est lié à l’indice des prix à la consommation. Les fonctionnaires nommés au plus tard le 1er juin 2017 bénéficient en outre d’une réduction de 15 % sur cette cotisation de régularisation si la demande est introduite le 31 mai 2019 au plus tard. Le travailleur indépendant peut choisir de régulariser ses années d’études contre un montant forfaitaire de 1 500 euros par année d’études ou de rester dans le système appliqué avant la réforme. Les travailleurs indépendants et salariés ne peuvent régulariser leurs années d’études antérieures à leur vingtième anniversaire pendant la période de transition, sauf s’ils ont terminé leurs études depuis moins de 10 ans.

Les cotisations de régularisation payées après la période de transition restent identiques pour ceux qui ont obtenu leur diplôme depuis moins de 10 ans. Pour ceux qui ont terminé leurs études depuis plus de 10 ans, la cotisation de régularisation s’élève à un pourcentage (compris entre 50 % et 95 %, selon la durée écoulée depuis la fin des études) de la valeur actuelle – au moment de la demande – de l’accroissement de la pension de retraite imputable aux périodes d’études régularisées. Les années d’études antérieures au vingtième anniversaire peuvent être régularisées dans les trois régimes.

Calcul de la pension
Les périodes régularisées sont valorisées au montant forfaitaire de la cotisation de régularisation divisé par 7,5 % (= 20 000 euros). À l’indice actuel, cela représente un gain de 266,66 euros par année d’études régularisée pour une pension au taux isolé et de 333,33 euros pour une pension au taux ménage. Cette règle s’applique aussi bien aux travailleurs salariés qu’aux travailleurs indépendants n’ayant pas droit à une pension minimum.

Dans le cas contraire, le gain par année régularisée correspond à 1/45e de la pension minimum. Ce gain correspond, à l’indice pivot actuel, à une revalorisation d’une pension au taux isolé de 313,84 euros (en cas de carrière complète, ou 311,66 euros en cas de carrière incomplète). Cette revalorisation est de 392,18 euros pour une pension au taux ménage (en cas de carrière complète, 389,45 euros en cas de carrière incomplète). Si le travailleur indépendant opte pour le système actuel pendant la période de transition, la pension est augmentée sur la base du revenu fictif.

En ce qui concerne les fonctionnaires, les années d’études régularisées sont, à quelques exceptions près, valorisées à 1/60e du traitement de référence. L’accroissement de pension chez les fonctionnaires est pris en compte pour le calcul du maximum relatif : le montant total de la pension (y compris les périodes régularisées) ne peut dépasser 75 % du traitement de référence.

Comportement de régularisation
Pour simuler les effets budgétaires d’une réforme de la régularisation des périodes d’études, il est nécessaire de déterminer la proportion de personnes qui, parmi les futures générations de pensionnés, régulariseront leurs années d’étude. Déterminer cette proportion nécessite aussi de savoir à quel âge (et en quelle année) cette régularisation aura lieu. En effet, l’intérêt financier d’une régularisation varie en fonction de la période au cours de laquelle les années d’étude sont régularisées et du temps qui s’est écoulé depuis la dernière année d’étude. Il est également nécessaire de s’interroger sur le nombre d’années d’étude qui seront régularisées.

Dans un premier temps est déterminée la proportion initiale de détenteurs d’un diplôme d’études supérieures au sein de la population partant à la retraite dans les différents régimes. Pour le secteur public, cette proportion est évaluée sur la base de la répartition observée des nouveaux pensionnés selon le nombre d’années de bonification pour diplôme. Dans les régimes salarié et indépendant, cette propor- tion est estimée selon la ventilation de l’emploi par sexe et niveau d’étude, pour la catégorie d’âge des 55-59 ans 5 ans auparavant. Ces ventilations des statistiques d’emploi par classe d’âge de 5 ans, et les statistiques similaires pour le secteur public, permettent d’évaluer l’évolution de la part des diplômés dans les générations futures de pensionnés. Les personnes de la catégorie d’âge des 50-54 ans sont supposées partir à la retraite environ 10 ans plus tard, ceux de la catégorie d’âge des 45-49 ans environ 15 ans plus tard, etc. L’évolution de la part des nouveaux pensionnés diplômés passe ainsi d’un peu plus de 22 % en 2020 à 38 % vers 2040 chez les travailleurs salariés. Chez les travailleurs indépendants et les fonctionnaires, cette part passe respectivement de 29% et 51 % en 2020 à 43 % et 70 % vers 2040.
Pour la grande majorité des générations d’âge actif, c’est au cours de la période transitoire de la réforme que la cotisation de régularisation est la moins élevée. Partant de l’hypothèse que les individus adoptent un comportement rationnel, les régularisations interviendront donc surtout pendant la période transitoire et plus spécifiquement entre 33 et 64 ans.

Notons que le cadre de réflexion théorique retenu suppose un âge moyen de fin des études de 23 ans et un départ à la retraite à l’âge légal. Les âges auxquels il est possible de régulariser ses années d’études dans ce cadre théorique se situent entre 33 ans (le dernier âge possible auquel on peut régulariser ses années d’études dans les 10 années qui suivent l’an- née de l’obtention du diplôme) et 64 ans. Pour toutes ces générations, régulariser ses années d’études après la période transitoire est plus onéreux (voir supra). Après la période transitoire, on suppose que seuls les jeunes travailleurs régulariseront leurs années d’études car ce groupe a la possibilité de continuer à payer une cotisation forfaitaire, plus avantageuse.

Régularisations pendant la période transitoire (juin 2017 – mai 2020)
Le taux de régularisation aux âges proches de la retraite est déterminé sur la base des observations des régularisations dans le régime indépendant (dans lequel la régularisation est possible jusqu’à la veille de la mise à la retraite dans le système actuel), et ce aussi bien pour les travailleurs indépendants que pour ceux des autres régimes. On procède ensuite à une adaptation pour tenir compte des différences de rendement des périodes d’études régularisées. Il en résulte un taux de régularisation en fin de carrière des salariés, indépendants et fonctionnaires ayant obtenu un diplôme de l’enseignement supérieur de respectivement 9 %, 11 % et 32 % pendant la période transitoire.

Pour déterminer le taux de régularisation au début de la carrière, on utilise les observations effectuées dans le régime salarié dans le système actuel. Parmi les générations qui sont parties récemment à la retraite, en moyenne 1,9 % des salariés ayant effectué des études supérieures ont régularisé leurs pé- riodes d’études. Les observations montrent toutefois que les jeunes générations actuelles ne régularisent pratiquement pas leurs années d’études. On suppose cependant que la nouveauté de la réforme exercera un certain effet d’attraction sur les jeunes salariés, de sorte que ceux-ci régulariseront leurs périodes d’études dans une proportion identique à celle de l’ensemble des générations antérieures. Cela revient à supposer que suite à la réforme 1,9 % des travailleurs salariés ayant effectué des études supérieures régulariseront leurs années d’études à l’âge de 33 ans. Ce pourcentage est ajusté pour les autres régimes de pension afin de prendre en compte les différences de rendement. Il en résulte des pourcentages de régularisation en début de carrière de 6 % chez les fonctionnaires et de 2,1 % chez les indépendants.

La part des personnes diplômées qui régularisent leurs années d’études est supposée augmenter avec l’âge. En effet, plus on est proche de la retraite, plus l’investissement est rentable.
Ces taux de régularisation peuvent être considérés comme des taux théoriques pour une cotisation de 1 500 euros par an. Ils doivent être adaptés dans le régime indépendant et celui de la fonction publique pour les raisons suivantes :

– Entre le 1er juin 2017 et le 31 mai 2020, les travailleurs indépendants peuvent choisir de régulariser leurs périodes d’études selon les paramètres de la période transitoire, à savoir une cotisation de 1 500 euros par année d’études, ou selon les paramètres du système actuel. Le ratio pension/cotisation (c’est-à-dire le rendement de la régularisation) peut fortement varier d’une génération à l’autre (selon la période au cours de laquelle les études ont été réalisées).
– Dans le régime de la fonction publique, il y a deux raisons pour lesquelles le taux de régularisation effectif est largement inférieur au taux théorique. De nombreux enseignants n’ont aucun intérêt à régulariser leurs années d’études car la durée de la carrière prise en compte dans le calcul de leur pension (y compris les périodes pour lesquelles une bonification pour diplôme est encore accordée) dépasse 41 ans et 3 mois (soit la durée après laquelle une pension maximum est atteinte pour un tantième de 55). En outre, les fonctionnaires qui, au 1er juin 2018, satisfont aux conditions de carrière pour partir anticipativement à la retraite conservent la gratuité de leurs bonifications pour diplôme.

Ces deux effets réduisent surtout le taux de régularisation des générations proches de l’âge de la retraite (le taux de régularisation effectif parmi les personnes qui sont à la veille d’un départ à la retraite est de 14%, le taux théorique au sein de cette population est de 32% en 2020). Le taux effectif est moins éloigné du taux théorique pour les générations plus jeunes (pour la génération la plus jeunes ces taux sont respectivement de 3 et de 6% en 2020).
Ensuite, il convient de déterminer quand la régularisation interviendra pendant la période transitoire. Des individus rationnels dans les régimes salarié et indépendant opteraient pour la régularisation la plus tardive possible du point de vue actuariel, à savoir en mai 2020.

Toutefois, l’information et la communication qui accompagneront l’introduction de la mesure pourrait inciter les individus à régulariser plus tôt. Compte tenu de l’entrée en vigueur de la mesure (1er juin 2017), les hypothèses suivantes sont retenues : 5% en 2017, 20% en 2018, 25% en 2019 et 50% en 2020. Dans le secteur public, on doit en outre tenir compte de la réduction de 15 % sur les cotisations jusqu’au 1er juin 2019. On retient donc les hypothèses suivantes : 5% en 2017, 30% en 2018, 60% en 2019 et 5% en 2020.

Régularisations après la période transitoire (à partir du 1er juin 2020)
Dans le cadre théorique retenu, on suppose que, chaque année, seule une génération procédera à la régularisation, à savoir celle des personnes âgées de 33 ans, car les cotisations restent identiques à celles de la période transitoire pour les personnes diplômées depuis moins de 10 ans.
Après la période transitoire, les périodes d’études antérieures au vingtième anniversaire peuvent également être régularisées pour ceux qui ont obtenu leur diplôme plus de 10 ans auparavant. Vu que les cotisations sont devenues plus coûteuses, seule une partie des personnes qui ont déjà procédé à une régularisation pendant la période transitoire choisiront de régulariser une deuxième fois des années d’études. Cette part est déterminée sur la base de la différence entre le taux de cotisation pendant et après la période transitoire.

Nombre d’années régularisées
L’estimation du nombre d’années d’études régularisées pendant la période transitoire est basée sur les observations d’avant la réforme : en moyenne, 3,5 années étaient régularisées chez les salariés, 4,9 années chez les travailleurs indépendants et 2,9 années dans le secteur public (sur la base des bonifications gratuites pour diplôme). Dans le secteur public, le nombre d’années est moins élevé en raison de la gratuité des bonifications pour diplôme pour les droits déjà constitués. La part des années d’études effectivement régularisées augmentera plus les générations sont jeunes et plus le nombre d’années d’études assimilées gratuitement diminue.
Après la période transitoire, le nombre d’années régularisées dans les régimes salarié et indépendant est augmenté d’une année pour tenir compte de la possibilité de régulariser des années d’études antérieures au vingtième anniversaire.

Résultats
Un grand nombre de générations régulariseront leurs années d’études pendant la période transitoire. Le total des cotisations sur l’ensemble de la période transitoire et pour les trois régimes de pension s’élève à 484 millions d’euros1. Ces cotisations se concentrent surtout sur la dernière année de la période transitoire, ce qui représente la formule la plus intéressante d’un point de vue financier. Chez les fonctionnaires, les cotisations seront surtout payées un an plus tôt (2019), vu la réduc- tion dont ils bénéficient dans ce cas.
En 2021, l’année qui suit la période transitoire, on devrait encore constater un grand nombre de paie- ments de cotisations, car les années d’études antérieures au vingtième anniversaire pourront également être régularisées dans les régimes salarié et indépendant à partir de cette année.
Ces recettes correspondent à 58.500 cas de régularisation dans le régime salarié, 23.500 cas dans le régime de la fonction publique et 16.300 cas dans le régime indépendant au cours de la période 2017-2020.

Après 2021, la régularisation des années d’étude se fait aux âges jeunes, dans les dix années qui suivent le terme des études (on peut considérer schématiquement que la régularisation ne concerne chaque année qu’une seule génération). Les recettes annuelles de cotisation sont stables et peu élevées (compara- tivement à la période transitoire). Notons que, dans le régime indépendant, pour certaines périodes, les recettes sont en recul par rapport au scénario sans réforme. Durant ces périodes, dans un scénario sans réforme ce sont les personnes qui se trouvaient à la veille de leur retraite qui régularisent leurs années d’études, alors que suite à la réforme, ce sont les générations jeunes qui régularisent (en moins grand nombre) leurs années d’étude.
Les dépenses totales de pension devraient enregistrer une baisse de 0,1 % du PIB vers 2060. Dans le régime de la fonction publique, le rachat des périodes d’étude n’étant que partiel, la suppression progressive de la bonification pour diplôme se concrétise par une baisse des dépenses de pension. Dans le régime salarié, la régularisation des périodes d’études se traduit progressivement par un montant de pension plus élevé à long terme. Chez les indépendants, on devrait constater un accroissement des dépenses de pension dans un premier temps, mais la diminution des régularisations (voir supra) entraîne à long terme une baisse des dépenses de pension.

Notons que les résultats présentés dans cette section sont à interpréter avec une certaine prudence. Ces résultats s’appuient notamment sur l’hypothèse d’une certaine rationalité des agents économiques et sur une base empirique restreinte quant aux comportements de régularisation (à savoir les taux de régularisation actuellement observés aux âges proches de l’âge de la retraite pour le régime indépendant, et aux âges actifs jeunes dans le régime salarié). En outre, le nombre de régularisations à venir dépendra en grande partie du degré d’information du public potentiellement concerné, élément particulièrement délicat à anticiper. Ces incertitudes entourant l’évaluation réalisée dans le présent rapport ne remettent toutefois pas en question ses principaux enseignements. À long terme, la réforme se traduit par une réduction du coût budgétaire des pensions. Les économies engendrées par la suppression de la bonification pour diplôme dans la fonction publique ne sont que partiellement érodées par le relèvement de la pension lié à la régularisation d’années d’étude dans les trois régimes. Ainsi, dans un scénario où les taux de régularisation dans les différents régimes de retraite (ainsi que les recettes de régularisation) seraient triplés (comparativement au scénario de réforme retenu dans le présent rapport), le coût budgétaire des pensions se réduirait de 0,07% du PIB à l’horizon 2060 (par comparaison à un scénario sans réforme, alors que cet écart est de 0,08% dans le scénario décrit.

Source : Bureau du Plan

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