Les salaires du secteur privé, plus sensibles aux évolutions de la conjoncture, ont augmenté moins vite que les salaires du secteur public.

Le dernier numéro de la revue scientifique Regards économiques publie les résultats d’une étude consacrée à la formation des salaires en Belgique sur la période 1995-2015. L’article examine le rôle des interactions salariales entre secteur privé et secteur public. La question de fond est de savoir si des hausses de salaires octroyées dans un secteur peuvent provoquer des hausses excessives dans l’autre au regard par exemple de la compétitivité et de l’emploi.

L’intérêt de distinguer les secteurs privé et public résulte de plusieurs facteurs. Le secteur privé se distingue par l’importance du progrès technique et des gains de productivité, mais aussi par son exposition à la concurrence internationale et donc une moindre maîtrise des prix de vente. Les logiques économiques des deux secteurs sont également radicalement différentes, marchande pour l’un, non-marchande pour l’autre.

Les chercheurs de l’IRES (UCL) étudient l’hypothèse selon laquelle les gains de productivité récurrents permettent aux entreprises du secteur privé d’accorder des hausses de salaires régulières à leurs travailleurs. Dans le cas de marchés du travail parfaitement fluides avec de faibles coûts de mobilité intersectorielle, le secteur public n’aurait d’autre choix que d’aligner ses salaires sur ceux du privé s’il veut rester attractif sur le marché du travail. En d’autres termes, le secteur privé jouerait automatiquement le rôle de leader salarial.

Ils relèvent que l’on peut aussi imaginer un mécanisme semblable en sens inverse : le secteur public étant «abrité» de la concurrence internationale pourrait accepter des augmentations de salaire, qui, par effet de contagion, se transmettraient au secteur privé et dégraderaient la compétitivité et donc l’emploi de celui-ci.

Les résultats économétriques sur la période 1995-2015 ne suggèrent pas l’existence, dans la formation des salaires belges, d’un secteur «leader» qui imposerait systématiquement ses hausses de salaire à l’autre secteur.

Ce résultat désamorce la crainte d’effets distorsifs pour la compétitivité et l’emploi. Par contre, des interactions sectorielles sont bien observées et sont importantes. Elles sont bidirectionnelles (sans «leader» systématique) et impliquent de forts effets de contagion puisqu’environ 50% d’une variation de salaire observée dans un secteur est rapidement répercutée dans l’autre secteur. Ce résultat est cohérent avec le degré relativement élevé de centralisation et de coordination dans la formation des salaires en Belgique.

Ces fortes interactions salariales sectorielles expliquent aussi la rapide propagation dans les deux secteurs des effets de chocs macroéconomiques. A long terme cependant, chaque secteur garde une large autonomie. Dans le secteur privé, les salaires répercutent intégralement l’évolution de la productivité du travail, avec néanmoins une tendance systématique négative de quelque 0,36% l’an qu’on peut interpréter en termes de changements structurels et de modération salariale. Au final, les salaires du secteur privé ont évolué moins vite que ceux du secteur public. Les fortes interrelations sectorielles ne signifient donc pas que les évolutions salariales sont strictement parallèles. La grande récession de 2008-2009 par exemple a affecté très différemment les secteurs privé et public. Le secteur privé est nettement plus sensible aux variations de l’environnement économique (productivité, chômage).

Source : Regards économiques – IRES – Arnaud Bourgain, Kirti Mehta, Fatemeh Shadman, Henri Sneessens

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